Version française / Articles et auteurs / Articles
- Libellé inconnu,
Les dirigeants des petites entreprises et la responsabilité sociétale enracinée
La démarche universaliste de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE)concerne essentiellement les grandes entreprises et particulièrement les firmes mondialisées. Nombreuses PE demeurent en marge de cette dynamique globale car les règles en matière de RSE ne sont pas transposables en tant que telles. Généralement, au sein des PE, la vulnérabilité économique, la focalisation sur le court terme, l’absence d’informations et la dépendance renforcent le cercle de passivité face à la RSE qui apparaît souvent comme incantatoire.
Le chapitre commence par une clarification du concept étudié. La théorie des parties
prenantes et la théorie de la dépendance à l’égard des ressources sont mobilisées. Le dirigeant doit gérer des parties prenantes dont l’apport des ressources et le soutien sont déterminants pour pérenniser son activité. La PE est plus vulnérable vis-à-vis de son environnement qui contrôle ses ressources (banques, client, collectivités, villages…) (Pfeffer et Salancik, 1978 ; Quairel F. et M.N. Auberger, 2005). N’oublions pas que la dimension financière est un élément essentiel dans l’engagement sociétal (Bowen, 2002). Les différentes logiques d’action et d’exécution des dirigeants sont également présentées. Deux dimensions sont retenues : la compétitivité et la légitimité. La mobilisation des théories néo-institutionnalistes est utilisée afin de bien cerner cette dimension dans nos analyses. Il s’agit donc d’axer notre démarche sur la logique d’action du dirigeant (vision, intention, buts), la logique d’exécution (ressources, compétences, mission, vocation), la quête de légitimité (fonction sociale remplie par l’entreprise et son dirigeant) et la compétitivité
(le positionnement face à la concurrence…). Il semble important de sortir des classifications du dirigeant établies uniquement sur la base de son activité de gestionnaire, indépendamment des aspects « contextuels ». Le chapitre s’appuie donc sur les travaux de la sociologie économique contemporaine et plus particulièrement sur le concept d’encastrement ou embeddedness. Loin de l’image de l’entrepreneur développé par Schumpeter (1935) du self-mademan, nos dirigeants sont des acteurs insérés dans des réseaux sociaux qui les modèlent (Reix, 2008). Le concept d’encastrement amène à envisager l’activité entrepreneuriale comme socialement située, l’action des dirigeants devant être considérée comme encastrée dans des réseaux de relations (Granovetter, 2000).
La notion d’encastrement peut être perçue comme un processus dynamique d’ancrage
géographique et une manière de mobiliser et de maintenir des ressources
relationnelles.
À travers ce travail, nous souhaitons faciliter la compréhension du processus d’appropriation par les acteurs des pratiques, des politiques et des concepts de RSE. Il s’agit de s’adresser sur le terrain à des dirigeants en leur demandant ce qui s’y passe et comment cela fonctionne. L’approche ethnosociologique par les récits de vie est donc retenue car elle implique l’analyse et la compréhension de situations à partir du vécu des individus. Elle est présentée dans le troisième point. Opter pour une démarche de type ethnosociologique à travers une méthodologie qualitative longitudinale constitue une perspective d’accès au réel, avec une profondeur dans la qualité et le sens des données que n’auraient pas permis une enquête statistique par questionnaire et/ou des outils comme les entretiens semi-directifs. Pour terminer, les résultats sont présentés et discutés. Le concept de Responsabilité Sociale de l’Entreprise Encastrée (RSEE) est proposé.
Mis à jour le 28 mars 2015
Fichier joint
Auteur
Soufyane FRIMOUSSE
Maître de conférences HDR, IAE de Corse